LES CHARMES DE LA MAISON HAUTE

— Nous étions trois amies inséparables. L’une était coiffeuse. L’autre soignante infirmière. Moi, je n’étais rien et mes parents venaient de mourir. Je ne pouvais subvenir à mes besoins et j’allais me séparer de la maison de mon père lorsque Marie-Josèphe la coiffeuse me proposa d’installer un atelier. Il est vrai que Josèphe avait un tour de main parfaitement exceptionnel, elle maniait le fer à friser avec une adresse remarquable. Il était évident qu’il lui fallait une apprentie pour faire chauffer les fers, les nettoyer consciencieusement et les passer à la virtuose qui faisait d’une triste tignasse, un objet de contemplation. Josèphe travaillait dans une boutique du Faubourg Saint Honoré et il lui fut facile de déplacer toute la clientèle. Les dames affluaient, c’était vraiment une aubaine. Quand vint l’été, elles se groupaient autour du bassin et l’épouse d’un colonel décréta qu’il nous fallait une geisha afin de proposer des massages. Une seconde habituée suggéra que nous devrions employer des danseuses. Une troisième exprima le désir de leur fournir des étalons. Cela n’était pas aisé. Nous allions subir les foudres de la police et peut-être de la maffia. Lucie avait des problèmes quant à son travail. Elle gagnait peu et assumait les gardes de nuit qui étaient harassantes, elle avait quelques notions du massage et se perfectionna auprès des Japonais qu’elle croisait au Café Riche où étaient organisés les dîners de japonisants. Cela fut une réussite. Nous leur dirigions une clientèle huppée tandis qu’ils nous enseignaient l’art de la perversion…