A LA RESERVE. ON SE RESERVE.

          Extrait : Le temps s'en va, Monica...       

        La soirée s’était déroulée fort agréablement et Marie était fière et heureuse, d’avoir été choisie par le plus séduisant. Il se prénommait Max.

         Cependant, elle se disait qu’encore une fois, elle n’avait pas eu de chance. Max était beau, certes, mais l’automobile, c’était l’autre qui la conduisait. Et par ce fait, il en était le propriétaire. L’autre, c’était André. Il était charmant et tellement simple malgré son immense fortune. Il racontait que la veille, il avait dû accompagner son père à un dîner au restaurant « La Réserve ». Quelle corvée ! C’était triste à mourir, chargé de protocoles. Soirée désagréable par excellence.

         — À la Réserve, on se réserve, avait-il dit avec mépris.

         Comme tous les Marseillais, les jeunes femmes connaissaient ce superbe établissement qui ne recevait qu’une clientèle de choix, le haut du gratin. Elles apprirent très vite que les parents d’André possédaient la savonnerie « Le Soleil, » et qu’ils vivaient dans une somptueuse villa sur la Corniche, une villa surplombant la mer. Marie-Do était un peu déçue, elle ne séduisait que des beaux garçons. Jules était beau, mais c’était un ladre. Max était beau, mais il était fauché. C’était tant mieux pour la copine. Madeleine allait avoir la chance de se promener en voiture. Cependant, Marie-Do regarda le profil du jeune homme et eut un pincement au cœur. Il ressemblait à un jeune dieu des statues antiques. Tout compte fait, elle se trouva satisfaite. Si un pareil garçon avait jeté son dévolu sur l’insipide Madeleine, elle en aurait fait une véritable maladie, une jaunisse peut-être.